La liberté d’expression au service des Lumières
Voltaire, de son vrai nom François-Marie Arouet est né à Paris, dans un milieu bourgeois et aisé. Dernier fils d’un notaire parisien, il perd sa mère à l'âge de sept ans. Il étudie au collège des Jésuites Louis Legrand, fait de brillantes études de rhétorique et de philosophie et se destine à une carrière littéraire, contre la volonté de son père, qui pensait qu'il ne pourrait pas vivre de ses écrits. Il fréquente les salons littéraires et la haute société parisienne.
Deux séjours à la Bastille
Ses écrits satiriques sur le Régent Philippe III d'Orléans en 1716 lui valent d'être exilé. Emprisonné à la Bastille en 1717. Il y reste onze mois et y écrit sa première pièce, « Œdipe ». Il prend le nom de Voltaire, anagramme de son nom : AROVET LJ (Le Jeune), le U et V, J et I se confondaient à cette époque. En 1726, à nouveau à la Bastille suite à une altercation avec le Chevalier de Rohan, il est libéré contre la promesse de s’exiler en Angleterre. Outre-Manche, il découvre les théories d'Isaac Newton et la philosophie de John Locke qui l’influencera fortement. Marqué par la grande liberté d'opinion dont jouissent les Anglais, il forme le vœu de réformer la société française sur le plan social et judiciaire
Sa lutte contre l’intolérance et le fanatisme religieux
De retour à Paris en 1729, ses tragédies « Brutus » (1730) et « Zaïre » (1732) connaissent un grand succès. À quarante ans, Voltaire jouit d’un prestige considérable, il est fortuné grâce à l'amitié de banquiers qui lui ont appris à investir et à spéculer. Cette assise financière lui permettait de quitter la France au cas où ses écrits seraient condamnés. Dans ceux-ci, Voltaire utilise l’humour et l’ironie pour dénoncer le pouvoir du roi, de l’Eglise, des juges, les abus sociaux. En 1734, il est contraint de quitter la capitale suite à la publication des « Lettres philosophiques», satire des mœurs et des institutions françaises. Il se réfugie en Lorraine chez la marquise du Châtelet. Leur liaison durera quinze ans. Tout au long de sa vie, à cause de cette censure, il publiera des écrits de façon anonyme. Voltaire s’est passionné pour plusieurs affaires et s’est démené afin que justice soit rendue, notamment dans l’affaire Calas (1762) qui lui inspira en 1763, le « Traité sur la tolérance », l’affaire Sirven (1764), l’affaire du Chevalier de la Barre (1766), l’affaire Lally-Tollendal (1776). L’attachement de Voltaire à la liberté d’expression serait illustré par la célèbre citation qu’on lui attribue : «Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’à la mort pour que vous ayez le droit de le dire».
De la Cour de Louis XV à celle de Frédéric II
Le philosophe s’intéresse aussi aux sciences. Il concourt pour un prix de l’Académie des sciences et en 1738, s’emploie à vulgariser les « Éléments de la philosophie » de Newton. En 1744, il est rappelé à Paris, protégé par Madame de Pompadour. Il devient historiographe du roi de France et lui qui cherchait à entrer à l'Académie française, y est élu en 1746. Les intrigues de la Cour lui inspirent « Memnon, histoire orientale » (1747), une première version de « Zadig ». Mais son ironie mordante et son imprudence lui valent d’être disgracié. En 1750, Voltaire se rend à Berlin. Il y reste trois ans, le roi Frédéric II lui versant une pension de 20 000 livres. Les soupers entre le roi et le philosophe sont restés célèbres. chez Frédéric II (où il constate que le despotisme éclairé est possible), il écrit « Micromégas » (1752). En 1753, il quitte Berlin à cause d’une querelle avec Maupertuis (président de l’Académie de Berlin) et s'installe à Genève avec sa maîtresse Mme Denis. Il écrit le «Poème sur le désastre de Lisbonne et Candide» Il est alors âgé de soixante ans. Il emménage en 1755 aux «Délices» à côté de Genève, et y invite ses amis académiciens, savants, comédiens, ambassadeurs…. Par sa correspondance (plus de 6 000 lettres), Voltaire continue à être en relation avec de nombreuses personnes influentes en France et en Europe, mais il a également de nombreux ennemis. En 1759, il achève l’un de ses chefs-d’œuvre, « Candide ou l’Optimiste ». A Paris, il publie la satire «Le Mondain» qui fait scandale et s'exile en Hollande. Les premiers chapitres du Siècle de Louis XIV, publiés clandestinement, sont saisis. De 1760 à 1778, Voltaire vit à Ferney, sur la frontière franco-suisse et correspond avec d'Alembert, Frédéric II et Diderot. Les premiers chapitres du Siècle de Louis XIV, publiés clandestinement, sont saisis. De 1760 à 1778, Voltaire vit à Ferney, sur la frontière franco-suisse et correspond avec d'Alembert, Frédéric II et Diderot.
Sa philosophie
Dans la pensée du philosophe anglais John Locke, défenseur du libéralisme en affirmant que le pacte social ne supprime pas les droits naturels des individus, Voltaire trouve une doctrine qui s’adapte parfaitement à son idéal positif et utilitaire. Étranger à tout esprit religieux, Voltaire se refuse cependant à l’athéisme d’un Diderot ou d’un Holbach. Il ne cessa de répéter son fameux distique : « L’univers m’embarrasse, et je ne puis songer que cette horloge existe et n’ait point d’horloger. » S’il reste attaché au déisme, il dénonce comme dérisoire le providentialisme (dans « Candide » par exemple) et repose cette question formulée dès Saint-Augustin : « Pourquoi existe-t-il tant de mal, tout étant formé par un Dieu que tous les théistes se sont accordés à nommer bon ? » Il va jusqu’à professer un antijudaïsme qui tient de son combat contre le christianisme dont il veut ébranler le fondement. Ainsi, il énumère les infamies qu'il attribue à la Bible et à ses fidèles : ces «animaux calculants» pas voués à participer à la vie politique, sociale et culturelle du pays. Toutefois, pour Voltaire, la croyance en un Dieu reste utile sur le plan moral et social. Il est l'auteur du célèbre alexandrin : «Si Dieu n'existait pas, il faudrait l'inventer . Dès « La Henriade » en 1723, toute l’œuvre de Voltaire est un combat contre le fanatisme et l’intolérance : « On entend aujourd’hui par fanatisme une folie religieuse, sombre et cruelle. C’est une maladie qui se gagne comme la petite vérole. » C’est à Voltaire, avant tout autre, que s’applique ce que Condorcet disait des philosophes du XVIIIème, qu’ils avaient « pour cri de guerre : raison, tolérance, humanité ».
A propos de Voltaire et Rousseau
Tout oppose les deux grandes figures des Lumières que la Révolution française a installées l’une à côté de l’autre au Panthéon, Voltaire en 1791, Rousseau en 1794. Voltaire est fils de bourgeois parisien, sujet d’une monarchie absolue. Son esprit se forme dans la fréquentation de la société du Temple et de la cour de Sceaux. Il aime l’argent, le luxe, le monde, le théâtre. Il fréquente les princes et les rois. Rousseau est fils d’horloger genevois, citoyen d’une république. Il est autodidacte et campagnard. Il aime la vie simple, le travail humble, la solitude, la nature. Tout les oppose et pourtant, les deux hommes ont entretenu longtemps des relations courtoises avant leur rupture en 1760.
Une grande popularité
L’ombre de Voltaire plane sur le XVIIIème siècle. Philosophe, auteur dramatique, poète, historien, polémiste hors pair, l’homme incarne « l'esprit français » de cette époque. Son talent d’écriture lui permit de parcourir presque tous les genres : la comédie, la tragédie, le pamphlet, le journalisme, le conte philosophique, l'ouvrage historique, le discours, la critique littéraire… Humaniste convaincu, il lutta pour la défense des droits de l’homme et contre le fanatisme religieux. Ses combats contre toute restriction de la liberté individuelle lui confèrent une immense popularité. Lorsqu’il revient à Paris en 1778, le peuple de la capitale lui réserve un accueil chaleureux et le porte en triomphe pour aller assister à la sixième représentation de sa dernière pièce « Irène ». En avril de cette même année, il devient franc-maçon initié dans la loge des « Neuf Soeurs » (que fréquentait aussi Benjamin Francklin). A sa mort le 30 mai 1778, le curé de Saint-Sulpice refusant de l’inhumer, il est enterré à l'abbaye de Scellières (près de Troyes). Ses cendres furent transférées au Panthéon le 11 juillet 1791, après une grande cérémonie sans la participation du clergé.